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mardi 12 août 2008

Des avantages d'une existence plus brouillonne

En feuilletant l'exemplaire de la revue Coup de pouce que m'a mère m'a refilé dans l'espoir que j'y trouve quelques trucs pour être plus organisée pour la rentrée, je tombe sur cet article qui me laisse perplexe. Des maquilleuses expertes en gestion de temps de maquillage y réorganisent la routine matinale douche-maquillage-coiffure de trois femmes. Ainsi, Catherine, 22 ans, qui avait une routine matinale de soixante minutes (vous avez bien lu!), voit sa routine « réoganisée » par des spécialistes en gestion de temps et réduite à un gros 35 minutes (vous de rêvez pas!), l'infirmière Diane, 53 ans, qui avait une routine de 65 minutes (vous de rêvez pas!) est désormais l'heureuse détentrice d'une routine de 40 minutes (vous de rêvez pas!), alors que Jasmine, 44 ans, voit sa routine passer de 50 à 35 minutes (vous de rêvez pas, bis, bis!)

Quand je lis ça, je me dis que, franchement, la désorganisation a du bon! J'ai beau gonfler les chiffres, lorsque j'examine pas propre routine, cela donne : 3 à 4 minutes pour la douche, 1 minute tout au plus pour la coiffure (je laisse sécher en gonflant avec les doigts tout en faisant autre chose, je n'ai donc, à la fin, qu'à peigner et donner, certains jours, 2 ou 3 pshhh de gel en aérosol), 20 à 30 secondes pour la crème de jour, 30 secondes pour le fond de teint, 20 secondes pour le mascara, 20 secondes pour le fard à joues, 10 secondes pour un pshhh de parfum, 15 secondes pour l' antisudorifique, 2 minutes pour le brossage de dents, qui n'est même pas présent dans la description détaillée des trois routines, pas plus que le parfum et l'antisudorifique d'ailleurs. Mon score : 9 minutes sans me presser! (les jours de grandes sorties, on peut ajouter 30 secondes pour le rouge à lèvres)

C'est vrai que je ne suis pas une adepte du poupounage extrême. Et je savoure la chance que j'ai : chaque matin, je dispose de 35 à 65 minutes de temps libre pour faire des choses tellement plus palpitantes dans une vie qui passe si vite. Je prends le premier exemple qui me passe par la tête : ce matin, si j'avais passé 65 minutes à me dessiner au crayon un contour des lèvres que personne n'aurait remarqué parce que personne ne remarque jamais ça, à me dessiner les sourcils au crayon, à appliquer l'une par dessus l'autre quatre crèmes toutes plus inutiles les unes que les autres, ben je n'aurais jamais su qu'aujourd'hui, Jade, Croc et Rivière des Nords, les trois amies imaginaires d'F2, avaient « gravi une montagne escarpée pour aller faire un pique-nique au sommet », et qu'une mouffette avait « fait pipi sur elles »; je n'aurais pas appris non plus l'existence des feux de nuages et des feux d'arc-en-ciel, bien différents des feux d'artifice m'assure F2 qui a eu la chance d'en admirer chez Rivière des Nords.




Si loin de la simplicité volontaire…

La femme désorganisée fait son ménage de printemps à la mi-août. 12 gros sacs de vêtements et de jouets à donner, et ce n'est pas fini. La honte me monte aux joues. Comment peut-on accumuler autant alors que d'autres n'ont rien? Comment peut-on consommer autant alors qu'on se dit préoccupée par les effets de la surconsommation? La maison est pleine d'objets inutiles…

PS. Et que dire des vingt grosses bibliothèques qui ne suffisent même pas à contenir tous les livres qu'il y a dans cette maison? Mais pour ça, la ménagère résignée n'essaie même plus de proposer un tri – chacun de ces milliers de livres est, paraît-il, suprêmement précieux et je commets un sacrilège chaque fois que je suggère qu'on n'a pas besoin de posséder matériellement tous les bons livres.


samedi 19 juillet 2008

La désorganisation


Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été désorganisée.

Passionnée de littérature, je suis pourtant allée faire un bac en théologie1 mais je ne m'intéressais déjà plus qu'à la philosophie. Pendant que je faisais ma maîtrise de philo, c'est la littérature qui me prenait tout mon temps et lorsque j'ai entrepris la maîtrise de littérature, je me suis surtout intéressée au traitement de questions philosophiques.

Toujours à côté de la plaque, incapable (mais en ai-je seulement la volonté?) de me discipliner un peu.

Je n'ai pas d'agenda, j'ai beau essayer d'en tenir un mais je ne parviens jamais à le faire plus de trois jours consécutifs. Je ne porte jamais de montre puisque je les perds toutes et que de toutes façons, ça m'agace tellement que je n'ai aucune envie d'en porter. Tous mes repas sont improvisés à la dernière minute et j'ai beau essayer de faire des listes d'épicerie réfléchies, je dois retourner acheter des choses oubliées presque chaque jour que Dieu fait. Là, les vacances arrivent, et je n'ai presque rien planifié. Mes achats de Noël, je les fais bien sûr le 24 décembre et lorsqu'il me faut me rendre à une réception, je suis toujours catastrophée de réaliser à la dernière minute que je n'ai pas, dans ma garde robe, les vêtements qu'il me faut mais que j'étais pourtant certaine d'avoir.

Connaissez-vous ça, vous, une mère qui n'arrive pas à se rappeler de la date de naissance de son deuxième enfant??? Ne me parlez pas de blocage psychologique, je suis folle de cette enfant, mais chaque fois qu'on me demande sa date de naissance et que j'hésite entre le 21, le 22 et le 23 du mois x, j'ai l'air de la sacrée perdue que je suis!

Connaissez-vous-ça, une femme qui, non seulement oublie à tout coup l'anniversaire de mariage, mais qui en plus, n'est même pas foutue de se rappeler la date de cet anniversaire! Et ne me parlez pas d'oubli volontaire, de blocage, etc. Ma relation avec l'Encrier dure depuis dix-huit ans et c'est bien la seule chose qui ait tenu jusqu'ici dans ma vie.

À côté de la plaque, bordélique et désorganisée. Je le dis en toute modestie : je pense que dans mon genre, je suis un phénomène.

La désorganisation a bien sûr un coût économique (ce n'est pas toujours beau-beau, les finances d'une désorganisée…), psychologique (crises de panique de la désorganisée qui n'a encore une fois rien prévu ni préparé alors que les invités arrivent dans quinze minute) et affectif (tant d'amis perdus de vue, oubliés, parce que je ne les rappelais pas, ayant l'esprit et le corps ailleurs…). Mais la plupart du temps, je vis assez bien avec, me disant que le peu de temps que j'ai, je ne veux pas le consacrer à des choses aussi rasoir que l'organisation. Mon entourage soupire, mais a bien dû s'y faire. Certains2 trouvent que cela a du charme :

― « Maaaadame, on vous trouve tellement drôle, perdue dans votre monde. Mais surtout, ne changez pas, c'est comme ça qu'on vous aime, on vous trouve tellement cute! » (propos d'élèves)

Et lorsque l'Encrier, enfilant du short étrangement étroit, se rend compte que c'est en fait une culotte d'F1 que la ménagère dysfonctionnelle a rangée dans son armoire, cela donne toujours lieu à de franches rigolades.

Comment ce blog a-t-il pu survivre aussi longtemps, et comment puis-je être fidèle presque chaque jour au rendez-vous, ces temps-ci deux fois plutôt qu'une, cela reste pour moi une énigme3. J'ai souvent tenté de tenir un journal, question d'agripper un fil d'Ariane et le suivre, quelle qu'en soit la direction, mais je n'ai jamais pu tenir bon plus de trois jours.

Je me suis habituée à moi-même et la plupart du temps, je coexiste assez bien avec mes défauts. Mais de temps en temps, la rage organisatrice me prend violemment, surgie d'on ne sait où. J'ai beau me moquer des amateurs de graphiques et d'algorithmes, je me pends alors à les envier. Et c'est alors la folie du rangement de tiroirs et de garde-robes qui s'empare de moi. J'emprunte les Coup de pouce de ma mère, je lis avec admiration et envie les menus et les comptes-rendus ménagers de Sahée et je me rêve semblable. Je suis dans tous mes états, comme si un esprit étranger s'était emparé de moi.

« Dieu du rangement, sors de ce corps! »

Tout ça pour vous dire qu'aujourd'hui, je rêve d'agendas, de schémas, d'algorithmes, de budgets, de listes d'épicerie, de planification détaillée, de fichiers Excel.

Et j'ai ce dilemme qui me taraude : je ne veux pas multiplier les blogs, je me connais trop pour savoir que je ne parviendrai jamais à en tenir plus d'un, mais l'aspect hétéroclite de celui-ci où se côtoient calligraphies, récits de mes déboires personnels, ma vie de famille et des morceaux de mon jardin m'agace de plus en plus. Vous me direz qu'il y a pire comme problèmes dans l'existence et j'en conviendrai, mais me voilà tout de même tourmentée.

Heureusement, je sais que la manie est passagère et que tout devrait rentrer dans l'ordre je redeviendrai moi-même sous peu.

(1) J'en suis aux aveux, mais pas de questions là-dessus s.v.p.

(2) Ceux-là ne vivent généralement pas avec moi 24h sur 24.

(3) Enfin, presque ;-)