Même enfant, j'ai toujours aimé la rentrée. Parce que pour les élèves comme pour les profs, le jour du nouvel an, le grand jour du renouveau qui permet au monde de renaître et de recommencer à neuf, ce jour -là advient fin août ou début septembre, c'est selon. La véritable année, pour nous, c'est l'année scolaire. L'autre, celle qui commence le premier janvier, n'est qu'une année officielle qu'on retrouve dans les calendriers et les agendas de la foule étrangère qui ne travaille, n'aime, n'espère ni ne sue à l'école, sans plus.
Les semaines qui précèdent le grand jour sont pleines d'une belle fébrilité. Les enfants ont hâte d'aller magasiner pour acheter vêtements et fournitures scolaires. Je mesure le fossé qui sépare les générations en prenant le pouls de l'intérêt immodéré de ma fille pour les fringues qui contraste fort avec la tempérance exemplaire dont elle sait faire montre lorsqu'elle envisage l'achat des cahiers (sauf s'ils sont à l'effigie d'Hanna Montana ou des Jonas Brothers), stylos, trousses à crayons. À son âge, je me foutais presque des vêtements qu'on m'achetait pour la circonstance. Mais quel émoi s'emparait de la fétichiste que j'étais déjà lorsqu'il me fallait acheter un stylo ou que mes parents m'en offraient un des leurs (que j'ai aimé ce Parker 51 qui avait appartenu à mon père), qu'il me fallait choisir de beaux cahiers neufs, quadrillés de préférence, deux (et non pas vingt) crayons à papier, un (et non pas sept) classeurs à anneaux, une (et non pas quatre) gommes à effacer. En ces temps antiques et mémorables, la papeterie Clairefontaine était difficile à trouver au pays, mais mon libraire de père avait accepté d'en tenir un peu en stock pour nous faire plaisir à mes sœurs et à moi. Et puis, il y avait le cartable neuf qu'on portait en bandoulière ou sur le dos, bien plus beaux mais moins ergonomique que les actuels sacs à dos en nylon, les livres neufs qui sentaient bon, la nouvelle salle de classe, le nouveau maître ou la maîtresse, le nouveau pupitre (à côté de qui serai-je assise cette année), l'enthousiasme nouveau.
C'était une autre époque, je vous le concède, mais l'excitation est toujours au rendez-vous, aussi bien pour F1 que pour moi. Nous sommes allées acheter baskets, sac (Hanna Montana) et vêtements (Hanna Montana et Jonas Brothers) mais il nous faut attendre de savoir quelle école elle fréquentera avant d'aller chercher les livres et les effets scolaires. J'ai tout de même commandé et reçu cette trousse à crayons en cuir noir. Une trousse comme il y en avait à l'époque, une trousse durera des années et qui préservera la mine des crayons de couleurs en empêchant qu'ils ne s'entrechoquent continuellement. Elle est plus belle que sur les photos, et la finition est impeccable. Après y avoir bien réfléchi, je crois que je ne la lui offrirai pas pour la rentrée : à l'école, elle risque trop de se la faire voler. La trousse restera donc cachée jusqu'à Noël et elle servira à entreposer les crayons à la maison. C'est un beau cadeau, je me ferai plaisir en l'offrant et je crois qu'il sera apprécié.
De mon côté, je suis en train de produire un plan pour un cours que je donne pour la première fois. J'ai demandé une charge de cours réduite de moitié, je ne devrais avoir que deux groupes. Seulement, il se pourrait qu'à la dernière minute on m'oblige, pour des raisons qui relèvent de la convention collective, à prendre une tâche pleine. Si c'est le cas, je passerai mon tour, je ne veux plus de tâche pleine, je l'ai dit et je m'y tiendrai. Je veux prendre le temps de voir grandir mes enfants, et puis j'ai d'autres projets que j'aimerais mener à terme. N'empêche, en construisant ce cours, la frénésie de la rentrée s'empare de moi. Et puis j'enseignerai dans un campus situé à quatre ou cinq minutes de chez moi, c'est formidable. La fétichiste en moi envie Hortensia qui vient de s'offrir un beau bureau et un fauteuil de travail confortable. Mais je me raisonne en me disant qu'un bureau ne sert à rien d'autre qu'à remiser ma paperasse et que, désorganisation oblige, je travaillerais toujours, de toutes façons, et même avec le plus beau bureau et le plus confortable des fauteuils, sur le plancher du salon, de ma chambre ou, au mieux, à plat ventre sur mon lit.
12 commentaires:
Merci, Encre, pour cette "délicieuse" relation.
Mon enfance a ressurgi et je me suis retrouvé dans ces situations que tu décris si bien.
Peut-être diras-tu un jour quel cours tu prépares, allongée sur le lit?
Bonne journée
J'avais un sac semblable à celui de la photo et la rentrée est associée pour moi à l'odeur du cuir mêlé à celui des cahiers neufs. Un plaisir. J'ai vécu la rentrée de mes enfants de la même façon, avec excitation. Cette année, c'est un peu différent. Même pas clair que ma fille au cegep y retourne au cegep. Elle dit que oui mais je n'en ai vu aucun signe et je n'ai rien payé.... c'est louche. Et la petite rentre mais je doute du choix de son école. Les années se suivent et ne se ressemblent pas.
Travailler étendue sur son lit...les ados font ça. quelle délinquante vous faites, Encre! ;o)
L'odeur de la rentrée.les livres qui sentent le neuf. J'étais pleine de bonnes intentions, je m'appliquais pour bien écrire, mais après une semaine le charme était rompu.
Comme toi Encre, j'ai toujours préféré les articles scolaires aux vêtements... Je me demande justement où se trouve mon magnifique sac d'école noir...
Les cahiers clairefontaine... J'en avais moi aussi... La personne qui les importe est dans mon entourage par personne interposée!
bonne journée...
Ah, la rentrée des classes... Ça me rend tellement nostalgique!
Herbert, n'allez rien vous imaginer, c'est une cours qui n'a rien de palpitant et dont personne ne veut : c'était le prix à payer pour enseigner au campus près de chez moi ;-)
Femmelibre, à propos de Dix-sept ans, il vaut parfois mieux faire une pause dans les études pour y revenir plus motivée - j'en vois trop qui "font du temps" à l'école. Par contre, ceux qui reviennent après une pause sont généralement très motivé. Bien sûr, il y a le risque de décrochage total, et je comprends tout de même vos inquiétudes.
Solange, eh oui! Mais si le charme n'était pas rompu après une semaine, la rentrée suivante n'aurait rien de magique. C'est parce que ce temps de la rentrée est extra-ordinaire est qu'il est bref, et vice versa ;-)
J'admire F1 dont les cahiers demeure à l'année longue de petits bijoux de propreté, de belle mise en page, de belle écriture régulière. On les mettrait en vitrine. Cela m'étonne d'autant plus que la tenue de cahier, si importante à notre époque, n'est plus du tout valorisée, ce qui est bien dommage à mon a vis, mais tout
a fait cohérent avec la société du gaspillage dans laquelle nous vivons (quand un élève du primaire a 20 cahiers, il y a de fortes chances qu'il ne leur accorde plus aucune importance et que tous ces cahiers deviennent des torchons)
Caro, drôle de coïncidence parce que c'était rare au pays, dans ce temps là. Mon père devait être le seul, en Outaouais, à les vendre.
Lesplaisirsetlesnuits - pourquoi ne pas te faire plaisir en retournant prendre quelques cours?
À tous : drôle comme chacun conserve un souvenir beaucoup plus olfactif que visuel de la rentrée!
Les fameux cahiers d'école, quel gaspillage! On en fait acheter bien trop, quelques griffonnages ici et là et puis fini, j'ai une tonne de cahiers à peine entamés à recycler et il s'en ajoute à chaque année.
C'est scandaleux! Liste du matériel scolaire obligatoire pour ma fille lorsqu'elle est entrée en quatrième année (9 ans) : 20 crayons à papier. 2 stylos bleus, 2 stylos rouges, 2 stylo verts, 2 stylos noirs, 4 surligneurs de couleurs différentes, 2 crayons de couleur, 12 crayons feutres fins, 6 bâtons de colle, 2 rouleaux de scotch tape, 4 paquets de 200 feuilles, 2 cahiers quadrillés, 6 cahiers Canada, 2 petits cahiers, 8 duo-tangs de couleur différente, 12 protège-feuilles, 2 paquets de séparateurs, 6 classeurs à anneaux de 1 pouce 1/2, 2 classeurs à anneaux de 2 pouces, 4 gommes blanches, 1 tablette de papier construction, un cahier à colorier, une paire de ciseaux,2 boîte de kleenex, une trousse.
Même avec son énorme sac d'école, ça a pris deux jours à transporter le matériel.
L'an passé et l'année précédente, à peine moins.
Bien sûr, il était inscrit sur la feuille que tout cela devait être neuf.
C'est scandaleux, et d'un ridicule consommé!! Je voilà en colère juste d'avoir écrit ça.
Ce sont les Dollorama et autres magasins du dollars qui font en sorte que les parents acceptent une telle chose.
L'an prochain, j'espère avoir le temps d'être sur le conseil d'établissement. Mais l'indifférence est tellement totale que je dote fort de parvenir à autre chose qu'à me mettre tout le monde à dos (je suis telllllllement diplomate ;-) )
Comme je te comprends de te mettre à mi-temps. Je n'ai même pas d'enfant et j'aurais parfois envie de le faire tellement la charge de travail est lourde. M'enfin...
Le bureau et la chaise, c'est primordial pour moi. J'aime être bien installée pour travailler. Je ne pourrais pas travailler sur mon lit ou dans une position précaire. J'aurais des maux de dos incroyables.
Oui, enfants ou pas, la tâche de travail est énorme. Et au risque de faire des comparaisons discutables, il me semble que c'est particulièrement vrai pour les profs de littérature et de philo qui doivent corriger des dissertations.
Le coordonnateur de mon département, qui se fait tordre les bras par l'administration, est revenu à la charge hier pour me proposer un temps plein. Comme je ne suis dans ce cegep que depuis une session et qu'ils ont 3 temps pleins à combler, je pouvais me faire jeter en refusant mais j'ai tenu bon. Fière de moi qui d'habitude a tant de mal à dire non! En plus, je conserve mon temps partiel :)
Contente de savoir que tu as eu ce que tu désires. C'est indéniable que notre tâche de correction en français et en philo est probablement la plus lourde. Par contre, les profs des autres départements sont désavantagés sur d'autres aspects de la tâche. Je pense par exemple aux stages à superviser à l'exétrieur du collège ou encore aux profs qui doivent donner plus de deux cours différents dans certains départements, etc. Bref, on ne chôme pas, et les profs de cégep qui se la coulent douce sont l'exception, comme au primaire et au secondaire d'ailleurs.
Tu as bien raison.! D'ailleurs, si corriger un examen de sciences ou de math prend une heure, le *construire* en prend vraiment plusieurs.
(Pour les préparation, je ne me rappelle pas d'en avoir eu moins de 3 une seule fois, souvent quatre et même 5. Mais ça, c'est parce que j'ai été longtemps dernière de département (à compléter ma tâche avec des cours du soir), pour ensuite travailler dans l'établissement Innommable qui survivait et survit encore, dans une autre ville, en exploitant ses employés. Là je n'en aurai qu'une seule, c'est le rêve. ;-)
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